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Art et Décoration  Volume VI    Page: 219
 
Les Maitres Décorateurs Français. René Lalique By Roger Marx
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Les Maitres Décorateurs Français. René Lalique.

conviens, rappels opportuns à la sobriété et à
la logique, dont plus d'un n'a pas manqué de
faire son profit, mais auxquels il faut se garder
de prêter une vertu trop étendue. La limite de
leur effet n'est-elle pas tracée d'ailleurs par
des différences radicales d'humeur, d'esprit et
d'existence? En France, le confort ne vaut que
paré d'élégance; cela tient aux rapports d'un
commerce plus fréquent, puis à un désir de
plaire devenu une sorte de point d'honneur; il
y a aussi lieu de compter avec la prééminence
attribuée à la femme dans notre société, et
avec sa nature, ici moins positive, plus délicatement futile. «L'Anglaise, dit Taine, ne sait
pas se faire jolie; elle n'a pas le talent d'être
dans son intérieur coquette et piquante, tandis
que la Française, à toute minute et devant
toute personne, se tient au port d'armes et se
sent à la parade.» Sa personnalité rayonne sur son entour
et en règle l'ordonnance; de
tout temps, au XVIIIe siècle, et
maintenant encore sa domination s'est exercée sur les
arts domestiques ; c'est pourquoi le caprice passager
d'une mode dénuée de grâce,
et quelques pastiches secondaires, assez rares en somme,
n'autorisent point à faire
dériver d'outre-Manche l'origine de toutes nos rénovations
décoratives. Lorsque la pensée va aux chefs et aux instigateurs de cette renaissance,
elle ne perçoit aucun lien qui
rattache à l'influence anglaise
la maîtrise d'un Galle ou d'un
Roty, d'un Jules Chéret ou
d'un Bracquemond; ceux-là
sont, voici un quart de siècle
ou plus, à la peine et à l'honneur; depuis, Alexandre Charpentier et Pierre Roche,
Dampt et Prouvé, Desbois et
Carabin, Aubert et Nocq,
tous les embellisseurs de la
vie et du foyer, ont pareillement échappé à la contagion
des styles étrangers ; et parmi
nous seuls pouvait se produire
un œuvre tout entier composé à la gloire de la
femme et pour l'exaltation de sa beauté,
l'œuvre radieux de René Lalique.

Soudainement les Salons l'ont désigné à la
foule. En 1894, les dépisteurs de signatures
nouvelles avaient retenu, pour leurs allures
peu banales, un vase de fer, puis une reliure
de la Walkyrie, malaisément appréciable à
cause de l'oxydation immédiate des dorures
qui rehaussaient l'ivoire; mais la véritable
révélation n'éclate que l'année suivante. Il
nous souvient de la surprise ravie où jeta cette
sélection initiale de dix-sept joyaux, d'aspect
et d'usage divers, pareillement exquis par le
décor, le travail; un seul eût suffi à conquérir
le suffrage de l'élite. L'éclat du succès ne laissa
pas, comme bien on pense, d'intriguer la
curiosité. Quel était ce nouveau venu à l'imagination prodigue, à la science protéiforme?
Non pas un débutant, à coup sûr, mais un
maître dont le talent avait mûri lentement.

dans le secret. De fait, la carrière de M. René
Lalique ne tardait pas à être divulguée :on
apprenait qu'ancien élève de l'École des Arts


Peigne.